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SRADDET Déserts médicaux - Marie-Angélique Latournerie

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Monsieur le Président chers collègues

Le droit à la santé est inscrit dans notre Constitution.

Au sortir de la seconde guerre mondiale, la France a cherché à instaurer, dès la libération du territoire, un ordre social plus juste en créant la sécurité sociale qui reposait sur le principe « chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».

Force est de constater qu’aujourd’hui ce principe s’est fortement érodé et la désertification médicale de certains de nos territoires en est une funeste illustration.

Territoires dans lesquels la chaîne de solidarité s’est fragilisée par les deux bouts, car, si chacun continue, à contribuer selon ses moyens, voire même plus, tant les cotisations pèsent sur le travail, tout le monde n’est pas garanti de recevoir selon ses besoins.

Appréhender la problématique de la désertification médicale, requière une première difficulté c’est l’absence de consensus  dans la définition d’un désert médical :

La densité médicale en France est de 270 médecins pour 100 000 habitants bien supérieurs au standard de l’OMS qui est de 250/100 000

En nouvelle Aquitaine, selon les données 2018 de l’ ARS Nouvelle Aquitaine, elle se situerait à un niveau supérieur de 285/ 100 000

La densité en médecins généraliste est aussi supérieure à la moyenne nationale avec 143/100 000 habitants (133 en France métropolitaine) avec une très forte inégalité de répartition territoriale notamment sur les départements des Deux- Sèvres (77/100 00 lot et Garonne (103/100 000).

La densité en médecins spécialistes est par contre inférieure à la moyenne nationale avec 156 /100 000 (170 en F M) avec là aussi une inégalité territoriale beaucoup plus marquée pour les départements de la Creuse 29/100 000 et les Deux Sèvres 36/100 000.

Le ministère de la santé définit un désert médical comme une zone dans laquelle la densité de médecins par rapport à la population est d’au moins 30% inférieure à la moyenne nationale :

Cette définition ne tient compte ni de l’activité des médecins  de plus en plus marquée par des changements sociologiques avec une nouvelle génération de médecins qui n’est plus disposée à travailler avec les mêmes conditions de disponibilité que la génération antérieure, une génération qui veut concilier vie professionnelle et vie privée, une forte féminisation de la profession,  la proximité de leur retraite, ni de la structure démographique de la population qui caractérise les besoins de la population : populations âgées, populations précaires, enfants...

La notion de désert médical se complexifie si l’on se fie aux critères de renoncement aux soins : Coûts, délais d’obtention d’un rendez-vous médical, éloignement géographique, temps de parcours, distinctions entre soins de proximité, soins prodigués par les médecins spécialistes, soins hospitaliers courants et d’urgence...

Autant de critères qui rendent très complexe la définition d’un désert médical, la notion étant d’autant plus subjective selon le niveau de prise en compte : Corps médical, patients ou bien élus.

Aussi, Mme la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn préfère retenir le terme de « difficultés d’accès aux soins » qui objective mieux les déficits de prise en charge pluri- professionnelles notamment dans le cadre des pathologies chroniques et les déficits  d’organisation territoriales à l’origine de la souffrance de nombreux acteurs de santé, qu’il s’agisse du secteur hospitalier mais aussi du secteur privé.

En quête de solutions :

Force est de constater qu’il n’existe pas de de solutions miracle

Depuis maintenant 10 ans, différentes mesures et lois ne sont pas parvenues à attacher les praticiens sur un territoire et ainsi remédier à leur inégale répartition sur le territoire

la loi HPST du 21 juillet 2009 propose la filiarisation des étudiants en médecine( 30 spécialités contre 11 disciplines), le contrat d’engagement de service public (CESP) trop contraignant , le contrat de clinicien hospitalier ( pour des postes présentant des difficultés particulières de toucher des éléments variables selon leur implications) et le contrat santé solidarité pour les praticiens en zone sur dotées de prêter main forte à des zones sous-dotées  faute de quoi ils doivent s’acquitter d’une pénalité

La loi Fourcade en 2011 vient corriger certains éléments de la loi précédente notamment le CSS car trop coercitif pour les médecins libéraux.

Les dernières propositions  faites par le PS à l’assemblée nationale sur le principe de conventionnement sélectif : L’assurance maladie ne conventionnerait plus un médecin qui souhaiterait s’installer dans un territoire sur doté en offre de soins, mesure déjà en application pour les IDE du secteur libéral, a été jugé trop dirigiste.

Dans les mesures régionales, c’est aussi la création du PACES Pau-Béarn voté en séance plénière du 26 juin 2017 suivi d’autres projets sur d’autres localités Agen, Dax...avec pour projet de participer au maintien d’une démographie médicale satisfaisante sur l’ensemble du territoire. On ignore encore l’impact d’un tel investissement.

Trop légère augmentation du numerus clausus qui n’est pas à la mesure des enjeux. Certains hôpitaux ne pourraient pas fonctionner sans l’apport de diplômes étrangers.

Le Plan Régional de santé en Nouvelle Aquitaine 2018, présenté par l’ARS pointe  quelques attentes fortes sur lesquelles s’appuient déjà nos politiques régionales

  • Le désir d’un exercice coordonné voire regroupé par le biais de la création de maison de santé pluridisciplinaires. Elles répondent au souhait des jeunes générations qui redoutent de plus en plus un exercice isolé.
  • La création de consultations avancées sur les structures hospitalières ou lieux de consultation existantes
  • Diversification et généralisation des lieux de stages pour les étudiants
  • La nécessaire délégation des taches : La loi du 26 janvier 2016 a ouvert la possibilité de certaines formes de délégation pour un meilleur partage de l’activité médicale entre praticien et professions paramédicales. La région participe par la formation (Plan Régional formation des carrières sanitaires et sociales) à ces transferts de compétence, notamment pour la prise en charge des maladies chroniques
  • la place des innovations en santé et innovations dans les pratiques, la place de la télé médecine est souvent présentée comme palliative à la désertification médicale de certains territoires, or elle n’est qu’une plus-value au service des professionnels et des patients

Conclusion

Aussi, pour assurer une présence soignante  pérenne et continue sur les territoires, les mesures incitatives et coercitives ont été inopérantes.

Il existe une plus forte attente de mesures plutôt structurelles avec une implication conjuguée des professionnels de santé et des élus pour construire des projets et innover dans le cadre d’une responsabilité territoriale partagée

Les freins à l’installation dans des zones sous-dotées ne sont pas d’ordre financier mais directement lié à un manque d’attractivité, zones sous dotées en infrastructures de tout ordre.

La généralisation du tiers payant voulue par le Président Emmanuel Macron est une fausse bonne idée, les médecins ont besoin d’être à 100% au service de leur patient. Il finira par convaincre les praticiens de la fonctionnarisation progressive de leur profession, ployant sous le poids des charges administratives 

Problème de la toute-puissance de l’administration Hospitalière, l’hôpital naguère organisé autour des services, dans une logique de soins se structure aujourd’hui autour de pôles épousant une logique administrative aveugle des vraies attentes des professionnels de santé, supprimant progressivement l’autonomie des soignants garante de l’excellence et  de la performance du système de soin français. Pour preuve, le mouvement social qui a fortement secoué le CHIC sud  Gironde en octobre 2018.