picto developpement economique seances plenieres nouvelle aquitaine

Règlement d’intervention des aides aux entreprises - Sylvie Durruty

Ce Règlement d’Intervention des aides aux entreprises décline la mise en application du SRDEII au travers de dispositifs spécifiques et expose les conditions de leur attribution aux entreprises.

Les aides classées selon les 9 orientations du SRDEII traduisent les enjeux à relever pour notre économie régionale.

Le constat est double :

D’abord, une complexité croissante des aides économiques régionales ces dernières années accentuée en 2016 par la juxtaposition des 3 RI en cours, le retard pris dans l’harmonisation des dispositifs, accentuant les disparités territoriales.

Ensuite, un réel besoin de lisibilité par les entreprises .

L’enjeu de ce RI est aussi un meilleur équilibre et le besoin d’équité entre nos territoires, la prise en compte des retards de développement et le soutien des TPE notamment qui représentent plus de 70 % de l’activité économique.

  1. Une nécessaire simplification et meilleure lisibilité du RI :

Les 64 RI  antérieurs sont abrogés.

Désormais un seul RI regroupe en un même document l’ensemble des aides régionales aux entreprises de tous les secteurs.

Avec pas moins de 123 dispositifs pour couvrir ce large spectre,

Y gagne-t-on en lisibilité ?

Sur la forme, des tableaux détaillent chaque dispositif (bénéficiaires, assiette, montant, régime juridique de l’aide…. ).

C’est une amélioration par rapport à la « jungle »qui était dénoncée auparavant notamment par la Cour des Comptes depuis 10 ans.

Si désormais, une partie des compétences est mieux répartie entre les différentes strates de collectivités, on peut regretter que la clarification des compétences avec les départements ne soit pas aboutie : le même empilement va subsister notamment sur le tourisme, l’agriculture, la forêt, la mer.

  1. Concernant l’immobilier d’entreprises, un certain flou

Désormais, la Région peut participer au financement de ces aides par convention avec la métropole ou les intercommunalités qui exercent seules de plein droit la compétence en matière d’aides à l’immobilier d’entreprises.

Le principe de non intervention de la Région est réaffirmé avec quelques dérogations notamment dans les territoires en déprise, ou dans le cas où « l’EPCI ne dispose manifestement pas des ressources fiscales suffisantes » ou si l’immobilier constitue l’outil de production

Ici, aucune assiette, ni intensité de l’aide régionale ne sont précisées.

Il ne pourra donc s’agir que d’un soutien au bon vouloir de la Région.

Ce RI doit être clarifié sur ce point.

  1. Sur  les aides de moins de 20 000 €  accordées aux entreprises

Elles sont attribuées par arrêté du Président sur la base du contrôle de leur légalité. Les autres sont attribuées par la CP.

Nous sollicitons la diffusion à tous les élus de la liste de ces aides inférieures à 20 000 € par souci de transparence lors de chaque CP.

  1. La contractualisation avec les EPCI

Cette contractualisation est essentielle, nous le savons tous.

Les discussions vont désormais pouvoir s’ouvrir sur des contrats spécifiques entre la Région et chaque intercommunalité notamment pour l’attribution des aides.

Au-delà, nous l’avons évoqué en commission, seule une  ingénierie adaptée permettra que cette réorganisation du développement économique dans nos collectivités profite à nos entreprises.

Il en est de même avec les départements pour les aides à l’agriculture, sylviculture, pêche et aquaculture.

De façon globale, concernant les dispositifs proposés, un certain nombre de points et un manque général de précisions sont à regretter

  • Aspect positif : unité du  document qui rassemble l’ensemble des aides, des tableaux détaillant les dispositifs et les modalités d’application.
  • Mais, bien des dispositifs apparaissent imprécis et flous, sans indicateurs de mise en œuvre. Il aurait été intéressant de préciser la fourchette budgétaire annuelle réservée à chaque dispositif ou orientation.
  • Nous regrettons, compte tenu de son potentiel d’emploi que le mot «Artisanat » ne figure qu’une seule fois dans ce RI.
  • Face au véritable défi du chomage, les aides à la création d’emploi sont limitées puisque réservées au recrutement d’un cadre ou d’un technicien dans les PME ou TPE et dans les Start up.
  • Enfin, nous constatons le manque d’outils d’évaluation et de contrôle des dispositifs, comme d’accompagnement spécifique des entreprises aidées.
  1. Sur l’Orientation 1 : 20 dispositifs pour la transition numérique, écologique, énergétique et la mobilité :

Le SRDEII posait les enjeux du territoire pour le numérique et les moyens à y consacrer.

Le chèque transformation numérique cible les PME et ETI prioritairement. Il apparait essentiel que les TPE soient aussi plus largement éligibles à ces aides du fait de leur difficulté de financement s’agissant éléments incorporels sans valeur de gage pour les banques. Ceci freine leur mutation vers de nouveaux modes de production et de commercialisation, de nouvelles formes de travail.

Le déploiement du THD :

Le soutien régional au THD nous renvoie à un constat beaucoup plus large et national d’un retard conséquent mis en avant par la Cour des Comptes.

L’absence de visibilité sur le budget annuel prévu sur le déploiement du THD à la fois au national et au régional ainsi que les délais annoncés qui devraient s’étaler sur 4 ans jusqu’en 2020 semblent peu réalistes.

Concernant le soutien au déploiement des tiers-lieux :

Nous saluons le fait que le territoire régional soit désormais éligible sauf le centre-ville de Bordeaux.

Le montant de la subvention est variable selon le degré de fragilité du territoire de 30 % à 50 % sans précision de ce degré de fragilité.

Ce qui compte avant tout, c’est la souplesse dont nous pourrons faire preuve pour accompagner ces projets souvent très différents et évolutifs.

Concernant les aides à la transition énergétique : 4 dispositifs prioritairement destinés aux PME et ETI et aux collectivités :

Le SRDEII ciblait notamment les efforts insuffisants de réduction des consommations d’énergies sur les activités économiques mais aussi le besoin de sensibilisation et le manque de formation de tous les acteurs.

Les propositions majeures du RI concernent la compétitivité énergétique des entreprises mais le budget annuel nécessaire a-t-il été anticipé compte tenu des enjeux ?

Concernant les aides à l’économie circulaire :

Il apparait un décalage entre l’ambition affichée par le  SRDEII et les accompagnements proposés au RI. A titre d’exemple, je citerai celui de l’écoconstruction que nous en retrouvons pas dans le RI.

  1. Orientation 2 : 44 dispositifs pour renforcer la politique des filières stratégiques régionales

Cette orientation couvre le champ des priorités régionales et s’adresse aux 11 filières retenues et à la Silver économie.

Concernant le Tourisme :

Avec 103 000 emplois, cette filière est essentielle, mais reste fragile car constituée d’un réseau de TPE indépendantes qui doivent faire face à l’évolution rapide des comportements et des attentes de la clientèle.

5  dispositifs maintiennent peu ou prou la politique actuelle concernant la modernisation des hébergements ou l’Innovation numérique

Aucun dispositif ne prévoit d’aide pour répondre à la pénurie structurelle de main d’œuvre dans ce secteur qui apparaît pourtant une véritable priorité.

  1. Orientation 3 : 5 dispositifs pour la performance industrielle et l’Usine du futur

Cette orientation concerne les PME et ETI du secteur industriel, le plus doté par la Région.

La Région Nelle Aquitaine proposait dans le SRDEII d’accompagner 600 entreprises sur 5 ans vers l’Usine du futur par un parcours personnalisé.

Mais, selon la position de la Région concernant les investissements immobiliers, seuls peuvent être soutenus les secteurs numérique, énergétique, agricoles agro-alimentaire, touristique, recherche /innovation.

Pourtant dans le tableau des aides page 56 rien ne confirme ces orientations, les bénéficiaires étant les PME et ETI en priorité et celles de plus de 10 salariés : concernant le secteur industriel, l’immobilier est-il subventionné sans restriction ?

Il n’y a donc plus d’aide à la création d’entreprise de production ACEP, telle qu’elle existait en Aquitaine.

  1. Orientation 4 : 15 dispositifs pour le développement par l’innovation

Ici, le soutien à l’innovation est envisagé au sens large pour les PME, ETI et TPE.

Nous saluons l’aide à l’amorçage pour les jeunes pousses innovantes. 

Le montant de l’aide est établi en fonction notamment des retombées économiques ce qui a priori peut paraître complexe à évaluer.

Nous souhaitons souligner que l’innovation reste transversale et que des aides à l’innovation peuvent concerner toutes les filières, comme l’agriculture, le tourisme, etc. …, ce qui peut être source de complexité  pour les porteurs de projets à la lecture de ce règlement d’intervention.

  1. Orientation 5 : 9 dispositifs relatifs aux TPE pour l’économie territoriale et l’entrepreneuriat

Les aides à la création d’entreprise sont réservées  à l’agro-alimentaire, aux Start up, aux TPE, aux entreprises PME de l’ESS.

Elles s’adressent aux demandeurs d’emploi et aux jeunes de moins de 30 ans mais, plusieurs conditions restreignent le champ d’application de la mesure notamment le  fort impact territorial dont on peut s’interroger de ce qu’il peut être pour une TPE créée par un demandeur d’emploi par exemple ?

De même, pourquoi limiter ces aides aux territoires fragiles ?

Ces conditions d’éligibilité trop restrictives devraient être allégées.

Aide à la transmission/ reprise de TPE

Sur ce point de la création et de la transmission des TPE, nous saluons le fait que la transmission familiale ne soit plus exclue. Le problème majeur reste souvent la difficulté à trouver les financements nécessaires à la pérennisation de l’activité. La majorité des créateurs de TPE est constituée de demandeurs d’emploi, qui ont, plus que d’autres, besoin d’être soutenus la constitution de fonds propres.

Nous regrettons l’absence d’aides à la formation des artisans aux pratiques innovantes (écoconstruction, rénovation thermique, accessibilité des bâtiments, etc.). 

De même, le SRDEII proposait de « permettre l’accès au crédit bancaire des TPE en consolidant les outils de garantie ». Nous ne voyons pas de mesure dans ce sens.

Plus globalement, nous demandons à nouveau l’augmentation des moyens financiers réservés aux TPE, à l’artisanat et au commerce.

  1. Orientation 7 :  4 dispositifs pour le retournement et la relance des territoires en difficulté pour toutes tailles d’entreprises

Le SRDEII a mis en évidence la faiblesse des moyens dédiés jusqu’ici au retournement des territoires et le  fait que « les règlements d’intervention actuels écartent de fait certains secteurs structurellement en souffrance ».

La relance des entreprises pour maintenir et développer les emplois, préserver les savoir-faire dans les territoires en difficulté sont des enjeux essentiels face auxquels 2 aides seulement sont proposées.

Le SRDEII allait plus loin dans ses propositions d’action que nous ne retrouvons pas ici et nous le regrettons (extension éventuelle du dispositif CADET, lancé en 2013 en Aquitaine,  création d’un outil de veille régionale territoriale, délimitation des périmètres géographiques des interventions,…)

Nous regrettons que ces points n’aient pas été pris en compte.

  1. Orientation 8 : 5 dispositifs pour l’internationalisation

Les aides proposées à l’internationalisation sont elles aussi en retrait par rapport aux objectifs affichés dans le SRDEII.

Elles sont exclusivement réservées aux PME et ETI selon le principe obligatoire du parcours à l’export.

Nous regrettons que ces aides export ne soient élargies aux TPE qui, n’ayant pas les moyens financiers et humains suffisants, ont des besoins accrus.

Nous attendions aussi la création d’une aide spécifique à la prospection des marchés avant toute démarche export.

Enfin, nous regrettons que l’idée de création de la marque régionale « ombrelle » ne soit pas reprise, comme celle de la mise en place d’une stratégie de marketing territorial qui aurait pu associer tous les territoires et les acteurs économiques autour d’un réseau d’ambassadeurs.

  1. Orientation 9 : 3 dispositifs pour le financement des entreprises

Ici, le SRDEII faisait notamment le constat du besoin en fonds propres des PME bridant leur développement, les freinant dans leurs mutations majeures, numériques, énergétiques, écologiques qui nécessitent des investissements importants.

De plus, lors des conférences territoriales, les entreprises suggéraient la mise en place d’un guichet unique permettant un accès équitable et ouvert pour toutes les entreprises aux différentes sources de financement.

Sur le financement des entreprises le RI ne répond pas à cet objectif donnant priorité aux projets innovants des PME et ETI.

Nous regrettons qu’une aide à l’accompagnement et au conseil des entreprises ne soit pas mise en place pour soutenir leur recherche de financement, notamment pour les petites PME de moins de 50 salariés.

En conclusion,

L’enjeu de ce nouveau RI est bien d’accompagner nos entreprises pour contribuer au développement économique de notre région et de nos territoires.

Au-delà des aides financières directes, les chefs d’entreprise attendent avant tout des responsables politiques,  un climat économique favorable et de l’oxygène : allègement de charges, des contraintes administratives, de normes, accessibilité du territoire, infrastructures adaptées, etc. …

Pour mesurer l’avancée de ce RI, il faudra surtout évaluer le bénéfice apporté face aux attentes des milieux économiques qui souhaitent, au-delà de la simplification et de la lisibilité des aides,  la réduction des circuits de décision car leurs temps et leurs impératifs ne sont pas ceux de nos collectivités.

Il sera essentiel de mesurer l’efficacité des aides au moyen d’une évaluation très régulière pour ajuster l’ensemble de ces dispositifs et s’adapter aux besoins des entreprises et de nos marchés en cours de mandature.